Au Wiels, depuis le 20 mars dernier, une exposition du travail de Anne Teresa de Keersmaeker est accessible au public. Ce dernier, habitué peut-être à déambuler dans les grands espaces du Wiels pour y voir des expositions d'art contemporain, pourrait s'attendre à découvrir archives de la chorégraphe sous forme de vidéos, "plans" de danse affichés aux murs et autres photographies. Mais ici, rien de cela, au contraire: un parti pris qui s'attaque à la difficile question de la relation possible (ou non) entre danse et exposition. Les deux ont chacun leurs espaces de prédilection avec leur temporalité propre.
Le sous-titre de l'exposition "Work/Travail/Arbeid" laisse entrevoir qu'il ne s'agira pas d'exposer des "traces" comme celles citées plus haut. De la danse, il y aura! Sans pour autant devenir une transposition de chorégraphie d'un espace qui lui serait familier à un autre qui lui serait étranger. Avec des danseurs, des danseuses, des musiciens et un chef d'orchestre. Et des spectateurs qui ne viennent pas au départ assister à un spectacle et pour qui rien n'est fait pour qu'ils confondent les lieux: pas d'e "scène", pas de sièges où s'installer, pas d'heure de début, pas d'heure de fin. Le public est bien invité à passer de la même manière qu'à travers une exposition dans ce continuum de 9 séquences d'une heure de chorégraphie conçue à partir de la chorégraphie "Vortex Temporum" retravaillée pour l'occasion. Une danse qui s'expose donc avec le travail que cela impose pendant 9 semaines au Wiels durant les heures d'ouverture habituelles.
En prenant le temps de voir la danse se déployer sur plusieurs heures, on accède au squelette du travail: des sons, des gestes entendus ou vus lors d'une autre "séquence" se répondent dans une autre. Le passage progressif d'un solo à une danse de groupe se fait avec la même transmission. Le musicien se fait "danseur" et interagit lui aussi dans la chorégraphie.
Impossible dans ce contexte de ne pas se sentir "dedans" aussi en tant que spectateur: au plus près de la sueur et des corps en plein effort, pour ne pas dire en souffrance bien sûr, on accède peut-être pour la première fois à l'intimité du travail que l'on peut observer sous toutes les coutures en se déplaçant dans l'espace. Une tension persiste heureusement: l'accès à ce travail d'orfèvre (précision, rigueur qui caractérisent le travail d'Anne Teresa de Keersmaeker) reste partiel; l'espace est composé de deux pièces où il peut se passer des choses simultanément. On aurait beau rester toute une journée à vivre ce travail de l'intérieur, on ne l'aurait toujours pas vu complètement.
A voir et revoir donc jusqu'au 17/05/2015 au WIELS
Centre d'Art Contemporain
Avenue Van Volxem 354
1190 Bruxelles
Mercredi au dimanche : 11h00 - 18h00
Nocturnes: chaque 1er et 3ème mercredi du mois jusqu'à 21h00